Personnes qui dansent

L’Émotion d’un Groupe en Mouvement

Dansez, sinon nous sommes perdus (Pina Bausch)

  • Conception : Mauro Paccagnella en collaboration avec Monia Montali & Alessandro Bernardeschi  
  • Avec les citoyen.ne.s de Namur   
  • Musique originelle live : Didier Casamitjana et Matthieu C. Vergez   
  • Création lumière et régie : Simon Stenmans   
  • Une production Wooshing Machine   
  • Coproduction Le Delta, Namur   
  • En collaboration avec Òmero studio

Nous avons récemment assisté à un spectacle chorégraphique participatif au Delta de Namur. Il s’agissait d’une nouvelle version du spectacle Adagio per un nuovo millenio - Capitolo due, une ode à la multiplicité du lien. Cela faisait suite à une première étape du projet en octobre 2023 à Charleroi danse. Chaque représentation du spectacle, lorsqu'il est présenté dans de nouvelles villes avec de nouveaux interprètes, est toujours unique : « Nous adaptons et retravaillons la pièce pas seulement en écoutant ce qui est présent à chaque étape du projet (de la rencontre aux pratiques physiques et à la récréation) mais aussi en s’adaptant à l’espace donné. C’est la combinaison entre ville, participants citoyens et espace de jeu qui font l’alchimie d’un spectacle qui, pour faire œuvre, cherche la rencontre et la découverte ».

Initié par la compagnie Wooshing Machine, sous la houlette de Mauro Paccagnella, en collaboration avec Monia Montali et Alessandro Bernardeschi, le spectacle a pris forme grâce à l’implication de 17 citoyen .ne.s qui se sont porté.e.s candidat.e.s.   Comme l’indique Mauro Paccagnela, « Pour pouvoir participer au projet, nous ne demandions pas une expertise technique dans le domaine de la danse. Nous cherchions simplement une envie d’y être et le plaisir de déployer un élan personnel ou de s’ouvrir à un geste partagé. C’est ce que les participants de Namur ont enfin apporté : cet « être en présence » qui affirme le soi en donnant force au groupe. C’est ce qui a fait de la performance au Delta une expérience artistique, citoyenne et humaine extraordinaire ». Le projet a impliqué la participation à deux ateliers rencontres de trois heures et huit jours d’ateliers de construction du spectacle de trois heures.

Créée en 1998 à Bruxelles, la Compagnie Wooshing Machine est un laboratoire d’expérimentation à la fois scénique et plastique, empruntant au théâtre, aux arts visuels et à la création musicale. Le travail de la compagnie accorde une place prépondérante au public et au lieu dans lequel il s’inscrit, Wooshing Machine élabore des projets qui mettent l’accent sur la démocratisation de l’art. 

Le spectacle se base sur la pratique chorégraphique du slow move, une gestuelle lente et calme à créer, apprendre et partager ensemble.   « Nous cherchons toujours des gestes singuliers et sincères, liées à une histoire personnelle ou à sa propre mémoire, c’est ici qu’on fait œuvre, quand le personnel devient expérience collective. Partager sans gênes ni jugements la simplicité d’un geste non nécessairement éduqué à la danse offre l’opportunité d’une force intime surprenante : la force du singulier dans le groupe qui l’inclût ». 

Pour Christine, « Participer à ce projet, c’est « faire société » d’une manière originale et heureuse.  C’est risquer ma présence et mon implication dansée par rapport aux membres d'un groupe — des inconnus au départ — et par rapport à un public, et recevoir en retour amour, joie, solidarité, humanité.  La qualité d’écoute, le respect et le désir de construire ensemble lors des briefings et débriefings m’ont beaucoup touchée : de cela les humains sont aussi capables, ce n’est pas un luxe d’en faire l’expérience à notre époque ! »

Adagio per un Nuovo Millennio Capitolo Due, c’est l’émotion d’un groupe qui bouge ensemble, où l’individualité demeure présente à elle-même, à la fois chorale et singulière. Ce groupe mouvant nous a offert une sensation d’unité, d’accord dans l’élan et de délicatesse. Et le public ne s’y est pas trompé, de jeunes spectatrices sur les gradins sont entrées dans la danse. 

Danseuse de flamenco et enfants

À noter que l’on assiste depuis quelques années, en Belgique et au-delà de nos frontières, à l’éclosion de nombreuses initiatives de participation dans la création chorégraphique contemporaine. Danses en amateur, œuvres participatives, co-créations, les dénominations prolifèrent, mettant en lumière une disposition particulière du secteur chorégraphique à inclure « des non-professionnel·le·s » dans la fabrique du spectacle. 

Étant donné son succès mondial, la danse participative contemporaine suscite des interrogations : s'agit-il simplement d'un phénomène de mode, d'une réponse à des injonctions idéologiques ou politiques spécifiques ? Ou bien, représente-t-elle réellement un espace où les préoccupations de nos sociétés contemporaines sont réfléchies, permettant ainsi l'émergence de nouvelles dynamiques entre l'art et la démocratie ?